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CELUI QUI A TOUT PERDU

CELUI QUI A TOUT PERDU PAR DAVID DIOP

Ce poème inscrit deux périodes historiques disparates et antagoniques que vit l’homme noir. La première période raconte les moments de joie, d’insouciance, de liberté et d’harmonie évoqués par les quatre tous derniers versets :

La lune, maternelle, accompagnait nos danses
Le rythme frénétique et lourd du tam-tam
Tam-tam de la Joie Tam-tam de l’Insouciance
Au milieu des feux de liberté.
Cette période de joie est soulignée par « le soleil » dont les rayons sont perçus comme
son rire. Heureux, il dansait frénétiquement avec les siens sous le regard « maternelle » de la lune. Sa joie s’explique par le fait que tout allait bien chez lui : il avait des femmes « belles et souples », bien pourvues des toutes les bonnes choses de la vie.

Il vivait en harmonie avec la nature et ne se souciait de rien. Bien pourvu il était au large, n’ayant point de soucis. Avec ses enfants il narguait, semble-t-il, les forces de la nature. Ses « enfants glissaient sur le grand fleuve/Aux profondeurs de mort », et ses pirogues « luttaient avec les crocodiles ». Les alliances marquées dans ces deux versets font apparaitre la paix parfait dans laquelle vit l’homme noir avant l’arrivée de l’homme blanc. 

Toute la nature conjuguait a lui rendre la vie paisible et harmonieuse. C’est de cette paix et cette harmonie que proviennent sa joie irrépressible et infectieuse, si bien que le soleil s’esclaffait en rire. Dans une telle circonstance, la lutte que livraient les crocodiles aux pirogues perd de tout son danger. Le monde dans lequel vit l’homme noir avant l’avenue des colonisateurs était, tout dit, un monde idéal, aventureux, paisible, harmonieux et d’insouciance.

La structure de ce court poème est très parlante : les deux expériences, mondes
représentés dans ce poème sont graphiquement repartis et par l’adverbe de temps « Puis » et par les deux pages qui semblent s’affronter.  Le poème est également marqué par la numérotation romaine (I & II). 

Ainsi  le poète donne a comprendre que les deux parties du poème inscrivent deux différents moments et expériences de l’homme noir. La partie II du poème démarque sa différence d’avec la première partie d’une façon tres dramatique : « le rythme frénétique », le regard paisible de la lune qui d’une manière « maternelle, accompagnait » les danses de l’homme noir, cède la place à un silence sensible. Les rayons du soleil s’affaiblissaient, « semblèrent s’éteindre ». Les cases de l’homme noir n’est plus ornées des « femmes… belles et souples ». Elles étaient « vide et sans sens ».

La violence avec laquelle l’homme blanc s’abusait des femmes de l’homme noir vaincu est saisie dans les deux versets suivants :
Mes femmes écrasèrent leurs bouches rougies
Sur les lèvres minces et dures des conquérants aux yeux d’acier.

Ne faisant aucun cas des sentiments et de l’homme noir vaincu et de ses femmes domptées, le colon avec des baisers violents, fait rougir de sang les bouches de celles-ci. L’absence de ses femmes, maintenant dans l’étreint brutal des mains du colon, fait perdre toute valeur,  tout sens, de la case du nègre dominé. Sa domination est démontrée par le fait que ses femmes dont l’homme blanc prélevait son droit de cuissage ne sont plus à ses côtés. 

Le manque d’égard pour l’homme noir recèle dans le fait que le colon ne cache pas ses affaires amoureux avec les femmes de l’homme noir. Encore plus, il ne prend pas en compte les sentiments de ses femmes lorsqu’il leur fait l’amour. La cruauté chez l’homme blanc conquérant est symbolisée par ses « lèvres minces et dures » et ses « yeux d’acier ». Diop, se récurant à une autre alliance pour mettre mieux en relief le manque de paix qui caractérise l’époque de la colonisation inscrit dans le poème les versets suivant :

« Et mes enfants quittèrent leur nudité paisible
   Pour l’uniforme de fer et de sang >>

La nudité est sensée être l’apanage des gens incultes, barbares et violents. Elle signifie le manque de civilisation. Paradoxalement, c’est lorsque les enfants de l’homme noir est sensé être civilisé qu’il perd la paix. En s’habillant d’uniforme, ses perdirent « leur nudité paisible ». 

Ils endossaient par contre la civilisation, symbolisee par l’uniforme, qui est pourtant souillée de sang. Dans une atmosphère de guerre et de l’esclavage, évoquée par la disparition des Tam-tams, le cœur du nègre perd de son insouciance : il est « déchiré » de peines. Sa tristesse est dû au fait qu’il a tout perdu.


ghhometutor 

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